Que veut dire espérer contre toute espérance ? Croire au-delà de toutes les conjectures que l’on peut formu­ler sur l’avenir. Espérer contre toute espérance, c’est croire au-delà de ce que l’on peut espérer raisonnable­ment. Se rendre en prison pour nous entretenir avec des détenus est une démarche très défiante. En effet, les sujets de découragement sont nom­breux. Paradoxalement, effectuer des visites en prison représente une démarche stimulante et nourricière pour notre foi. Cette démarche est au cœur de la vie de la foi puisque nous sommes appelés à laisser une porte entrouverte à l’impossible. C’est un comble de parler de porte entrou­verte en milieu carcéral !

L’espérance est nécessaire, car elle nous oriente vers Dieu. Dans la Parole de Dieu, l’espérance est l’une des trois vertus avec la foi et la charité. L’espérance est, par conséquent, une composante essentielle de la foi chré­tienne. On parle parfois de « crise de foi ». Ne sommes-nous pas souvent confrontés à une crise d’espérance parce que nous ne savons plus espé­rer ? Une banderole est restée long­temps accrochée sur un rond-point. On pouvait y lire ce slogan : « Notre futur n’a pas d’avenir.» N’y a-t-il pas derrière ce propos désenchanté le reflet d’une terrible désespérance ?

Un écrivain disait : « Espérer c’est recevoir sans posséder.» Celui qui pense «se posséder lui-même » en étant parfaitement à même de gérer sa propre vie en toute autonomie se fourvoie ! Notre société individualiste a tendance à renforcer ce sentiment de toute-puissance individuelle. Nous nous rappelons aussi que si nous avons la grâce d’être en com­munion avec Dieu, nous ne possé­dons pas Dieu !

Espérer, ce n’est ni se posséder soi-même, ni posséder Dieu. Espérer c’est tendre vers, s’orienter en direction de… espérer pour moi, c’est « mettre en Dieu son espérance ». Tant que nous accrocherons l’ancre de notre espérance ailleurs, nous serons ter­riblement vulnérables ! Espérer dans nos réalisations ? dans nos projets ? Nos réalisations, nos projets peuvent allumer des étoiles en notre nuit, mais ne peuvent la dissiper ! Espé­rer c’est reconnaître et assumer nos imperfections, la vulnérabilité de nos existences.

Le voyage, Abraham ne l’a pas fait en avion avec une compagnie low cost en un claquement de doigts. Il fit son voyage durant des mois et des années. Abraham a appris l’es­pérance dans la persévérance ! Dieu lui accorde par moment des signes d’encouragement. Par exemple, Dieu le conduisit dehors et lui dit: «Lève les yeux au ciel et dénombre les étoiles si tu peux les dénombrer» (Gn 15). La scène se déroule certainement de nuit. Il fait nuit dehors et il fait aussi sombre dans le coeur d’Abraham. C’est l’obs­curité de la déception, du décourage­ment. L’espérance, c’est oser regarder la réalité en face, tout en jetant son ancre en direction de Dieu. L’Évangile de Mat. (25:35-37) nous invite à rendre visite à celles et ceux qui sont dans le dénuement, dans l’isolement, la solitude. Celles et ceux qui vivent des circonstances ou le désespoir est exacerbé, méritent une attention particulière. Si les condi­tions carcérales sont souvent diffi­ciles, on peut néanmoins y prendre conscience de la portée destruc­trice de la violence et de la rancœur. Conscient de cela, on peut alors découvrir la puissance libératrice et réparatrice du pardon, une opportu­nité de cheminer dans la découverte de Dieu. Visiter une personne en déten­tion, c’est lui offrir la possibilité de parler des questions de Dieu et de les encourager dans une foi nais­sante ou en reconstruction. C’est inviter cette personne à tourner son regard vers Dieu et à entrer dans le chemin de l’espérance que ses promesses et son amour sont encore réelles aujourd’hui.

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